Joueur de talent brillant mais intermittent, Luis Alberto a véritablement éclos depuis son arrivée à la Lazio. Fondamental dans le système de Simone Inzaghi, l’Espagnol est l’un des atouts majeurs du club laziale dans sa quête d’une qualification pour la Ligue des Champions.
Au royaume des passeurs, Luis Alberto talonne le souverain. Le n°10 de la Lazio a délivré 8 passes décisives en Serie A cette saison, un rendement remarquable puisque seul Kevin De Bruyne (Manchester City), du haut de ses 9 “assists”, fait mieux parmi les principaux championnats européens. Depuis son arrivé à Rome en 2016, l’Espagnol a franchi un cap. Directement impliqué dans un tiers des buts de son équipe sur la scène nationale, Luis Alberto est aujourd’hui incontournable. Une évolution pourtant loin d’être prévisible il y a encore quelques mois.
Une arrivée sur la pointe des pieds, puis l’explosion
Formé à Séville, le natif de San José del Valle se révèle avec l’équipe B du FC Barcelone, où il brille aux côtés de Gerard Deulofeu. Il entre dans une autre dimension à l’été 2013 en s’engageant avec Liverpool, qui débourse 8 millions d’euros pour s’offrir ses services. La marche est haute, beaucoup trop haute. Titularisé à deux reprises seulement, Luis Alberto ne parvient pas à s’imposer chez les Reds. Prêté à Malaga puis au Deportivo La Corogne, il rejoint la Lazio dans les dernières heures du mercato estival en 2016. Malgré de belles prestations en Galice (6 buts et 7 passes décisives en Liga), il connaît des débuts difficiles à Rome. Scotché au banc des remplaçants, il ne joue que 27 minutes durant la première partie de la saison. Le milieu offensif doit attendre le 8 janvier pour connaître sa première titularisation. Contraint de prendre son mal en patience, il inverse la tendance lors de l’exercice 2017-2018.
Titulaire en ouverture de la saison lors de la Supercoupe d’Italie remportée 3-2 face à la Juventus, il ne quittera plus le 11 de départ par la suite. L’Espagnol ne laisse pas passer sa chance et trouve son rythme de croisière, au point que Julen Lopetegui lui offre sa première sélection avec la Roja à l’occasion d’une rencontre amicale remportée 5-0 contre le Costa Rica en novembre. Quelques semaines plus tard, la Lazio fait parapher un nouveau contrat à son maestro. En soutien de Ciro Immobile, Luis Alberto régale. Un chef d’orchestre qui, d’un coup de baguette (magique), peut sortir son équipe de l’impasse, dans le jeu comme sur coup de pied arrêté. Sa qualité de passe et sa vision du jeu en font un redoutable pourvoyeur de caviars. Il achève sa saison avec 12 buts et 18 passes décisives. Les promesses longtemps entrevues par le passé se confirment enfin au plus haut niveau. Ses performances lui offrent un nouveau statut, symbolisé par son changement de maillot. Il laisse le n°18 pour endosser le n°10, auparavant porté par Roberto Badiani, Vincenzo D’Amico, Michael Laudrup, Paul Gascoigne, Roberto Mancini ou encore Hernan Crespo.
Molto felice di prolungare il mio contratto con @OfficialSSLazio Siamo grandi insieme. Tanta voglia di arrivare al meglio questa stagione. Grazie a la società per la fiducia, a i miei compagni, alla mia famiglia e @youfirstsports per fare più che un lavoro FORZA LAZIO! 1️⃣8️⃣ pic.twitter.com/GFriWTW1Og
— Luis Alberto Romero (@10_luisalberto) February 6, 2018
Tout semble alors sur les bons rails, mais la machine s’enraye. 6 buts et 6 passes décisives “seulement” en 2018-2019, la faute à des pépins physiques répétés. “Je n’ai pas pu faire la préparation à cause d’une pubalgie et des problèmes que je traînais aux adducteurs. J’ai commencé à 20% et j’ai joué quasiment toute l’année en étant blessé. Les gens ne savaient pas ce qui se passait et j’ai dû vivre avec les critiques“, explique-t-il à Marca.
De trequartista à mezzala
Revanchard, l’international espagnol est parti sur des bases très élevées depuis le début de la saison : “Pendant l’été, je n’ai pas cessé de travailler pour pouvoir être à 100% et le changement a été radical. Je suis peut-être dans ma meilleure période depuis que je joue au football“. Titulaire lors de chacune des 12 premières journées de Serie A, il n’a manqué que 25 minutes de jeu en championnat (1 055 minutes sur le terrain). Seul le défenseur Francesco Acerbi (1 060 minutes) fait mieux parmi les autres joueurs de champ de la Lazio.
Luis Alberto a retrouvé l’inspiration qui lui avait fait défaut la saison dernière, mais dans un nouveau rôle. Depuis plusieurs mois, il évolue plus bas dans le 3-5-2 des Biancocelesti. En position de relayeur avec une sentinelle comme Lucas Leiva derrière lui, la place de second attaquant revenant désormais à Correa. Un rôle de mezzala dans lequel il est le véritable cerveau de l’équipe. Tous les ballons passent par les pieds du n°10, qui peut exploiter sa vision du jeu et sa qualité de passe pour orienter et dicter le tempo. “Le Mister m’a donné la continuité et la confiance que je cherchais. Il m’a fait reculer pour que j’ai plus de liberté et d’espaces avec le ballon. Il veut que je sois plus protagoniste, cela nous réussit bien à moi et à l’équipe“, analyse le principal intéressé. Des performances qui lui ont valu un retour en équipe nationale au mois d’octobre, preuve que le Luis Alberto qui a tant enthousiasmé les tifosi en 2017-2018 est bien revenu.
Sa prestation contre le Milan AC le 3 novembre lui a valu les louanges des observateurs transalpins. “Il transforme en or chaque ballon qu’il touche“, souligna Leggo. “Un numéro 10 adapté à l’herbe légendaire de San Siro” pour le Corriere dello Sport. “Cela faisait 36 ans que je n’avais pas vu un numéro 10 de Lazio jouer aussi bien“, s’exclama Vincenzo D’Amico. Ce soir-là, le magicien andalou illumine la rencontre et la Lazio s’impose à San Siro, une première en championnat depuis 1989.
Dans le sillage de son chef d’orchestre, la Lazio regarde vers les sommets. Depuis l’arrivée de l’Espagnol, les Biancocelesti ont disputé deux finales de Coupe d’Italie, une perdue en 2017 et une gagnée en 2019, sans oublier une victoire en Supercoupe d’Italie (2017). Alors que le club n’avait plus atteint la barre des 70 points en championnat depuis le titre de 2000, les hommes de Simone Inzaghi ont réalisé cette performance en 2016-2017 (70 points) ainsi qu’en 2017-2018 (72 points). Prochaine étape : se faire une place dans le top 4 du Calcio pour goûter à la reine des compétitions européennes. “Le principal objectif, c’est celui qui nous a échappé ces deux dernières années, se qualifier pour la Ligue des Champions. C’est le souhait du club et le nôtre. Le groupe est le même, mais la mentalité a changé : nous sommes convaincus de ce que nous faisons“, affirme le n°10.
Au bord de l’élimination en Ligue Europa avant la cinquième journée de la phase de poules, les Romains n’ont plus d’excuse. D’autant que l’attente commence à se faire longue puisqu’il faut remonter à la saison 2007-2008 pour retrouver le club sur la plus prestigieuse des scènes européennes. Troisième avec 24 points au compteur, la Lazio aura bien besoin de son magicien pour tenir la distance face à des rivaux comme l’AS Rome ou Naples. Et ce dès dimanche à Sassuolo.
Quentin Ballue