Les centaines de milliers d’adeptes de Mon Petit Gazon, désormais plus connue sous son acronyme MPG, ont également l’opportunité de jouer avec plaisir – et sans risque – au petit jeu des pronostics lors des grandes compétitions internationales que sont la Coupe du monde et, en ce moment-même, l’Euro 2020. Baptisée Mon Petit Prono, cette app’ de paris à savourer en famille ou entre amis rassemble amateurs du jour et passionnés de la première heure. L’un de ses fondateurs, Martin Jaglin, raconte à Caviar la recette de ce nouveau succès.
Lundi 28 juin 2021, 23h57. La France du foot, qu’elle soit des plus fervents suiveurs comme des amateurs du ballon rond d’un soir se passionnant pour leur équipe nationale, prend une sacrée meule de gruyère sur la tête. Beaucoup de peine, d’incompréhension, mais aussi de déception pour une équipe tricolore qui aurait pu bien mieux faire que se laisser entrainer à la « loterie » des tirs aux buts face à onze helvètes jouant crânement leur chance, et pas seulement Haris Seferovic.
Les relances axiales françaises des dix dernières minutes et la qualité de finition de Gravanovic, couplées à une ultime transversale de Coman et ce tir malheureux du « génie français » (coucou Stéphane Guy) Kylian Mbappé, n’ont pas seulement fait les affaires de la Suisse, et de Yan Sommer, le héros d’un soir. Le portier de Gladbach ne se doute pas que, sur leurs smartphones et autres appareils électroniques, des millions de notifications à fond bleu sont apparues pour proposer aux utilisateurs de Mon Petit Prono, dites aussi MPP, de consulter le résultat de ce match.
Des centaines de milliers de collègues, amis, membres de la famille ou même inconnus scrutent le classement général pour constater qu’avoir pronostiqué une victoire française ne leur rapportera aucun point ce soir. Martin Jaglin est l’un d’entre eux. Membre fondateur de Mon Petit Gazon (MPG) voilà maintenant dix ans, le jeune Français se réjouit néanmoins devant le succès connu par Mon Petit Prono. Application en vogue de la compétition pour les francophones, MPP permet à quiconque se créant un compte de pronostiquer l’intégralité des matchs de l’Euro 2020.
Et Martin Jaglin, malgré l’amertume de la contre-performance des coéquipiers d’un Paul Pogba pourtant rayonnant, constate que de plus en plus de personnes se prennent au jeu du paris sportif 100% gratuit. « On a compté, au 6 juillet 2021, près d’un 1 100 000 utilisateurs de Mon Petit Prono ! Avoir dépassé le cap du million, hautement symbolique, nous réjouit d’autant plus que nous n’avons recours à aucun contrat publicitaire pour faire promotion de notre application. La promotion de nos applications de jeu autour du foot, comme MPG, ne se fait que par ses utilisateurs. C’est le bouche à oreille qui conduit toujours plus de personnes à rejoindre nos app’, et MPP bénéficie d’un engouement génial durant cet Euro ».
Rassembler pros et néophytes du ballon rond le temps d’une compétition
Le jeu de pronostic n’en est pas à ses premières 90 minutes. La toute première version de Mon Petit Prono a été lancée en 2014, pour la Coupe du monde se déroulant au Brésil. Comme pour MPG, l’idée d’une appli’ séduisant par une utilisation ouverte à tous, que l’on aime ou non le ballon rond, et rassemblant chacun des participants le temps d’une compétition majeure, a fait son chemin.
« L’idée nous est venue avant la Coupe du monde 2014. Avec plusieurs amis, on pronostiquait les matchs entre nous sur de vieux fichiers Excel, qu’on échangeait après les matchs pour constater les paris de chacun d’entre nous. On n’avait même pas, alors, un fichier partagé, on devait s’envoyer nos fichiers en ligne et finalement, on trouvait ça assez limité », explique Martin Jaglin. Les contours du futur MPP sont pensés à la suite de cette galère, ouvrant la voie, par ailleurs, à une utilisation plus large. « Il fallait changer ça ! On voulait voir les pronos des copains, ajouter un espace pour chambrer avant, pendant et après les matchs. La première fois qu’on a ajouté une option de pronostics pour la Coupe du monde 2014, on l’a directement intégrée dans MPG, après avoir fermé l’espace dédié à la Ligue 1 fin mai. Bon, ça piquait un peu les yeux, mais on a vite vu que c’est devenu viral. »
Lors du dernier Mondial qui a vu les Bleus triompher en terres russes, 850 000 utilisateurs ont été comptabilisés sur Mon Petit Prono. Si le système de cote avant chaque match est aujourd’hui calqué sur celles proposées par un célèbre site de paris sportifs en ligne, il n’en a pas toujours été ainsi, comme le narre Martin Jaglin. « A la base, nous n’avions pas de partenaire commercial. On avait commencé par un système classique proposant de choisir l’issu d’un match au format 1 N 2. C’était assez ennuyeux pour le coup, il y avait moins de montagnes russes dans les classements, peu de stratégies à élaborer même pour les plus fins parieurs ». Ce qui a peut-être aussi permis d’attirer de nombreux néophytes. « Jouer les favoris suffisait, on gagnait autant de points en mettant la Suisse gagnante que la France. On voulait mieux récompenser la prise de risque. Dès lors, le fait d’avoir ajouté la cote facilite la création de stratagèmes ».
De quoi pimenter les soirées de compétitions pour le co-fondateur de MPP. « On peut s’amuser à imaginer les débats et jouer sur les clichés. Par exemple, de celui du bon père de famille qui ne prend pas de risque et ne joue que les petites cotes, avançant doucement mais surement au classement. Mais aussi du cousin fou qui met la Finlande gagnante contre le Danemark et empoche 120 points ! Cela crée des rebondissements, un feuilleton entre amis et famille. Je m’imagine le tonton qui, après la victoire suisse contre la France, sort à qui veut bien l’entendre : “ah je l’avais dit”. Et finalement, ça nous rapproche ».
Un format complexe à transposer sur les compétitions domestiques
France-Suisse aura fait des ravages. D’après Martin Jaglin, 77% des utilisateurs ont pronostiqué une victoire tricolore, tandis que les 43% des pronostiqueurs qui ont désigné Mbappé meilleur buteur potentiel de la compétition ont vu leurs points fondre comme neige au soleil. Les petits malins qui ont coché la cote du nul ont ainsi été récompensés, le résultat du match validé par MPP prenant en compte les prolongations, mais pas les tirs au but. Le « seum », immortalisé par la sélection belge après la demi-finale de la Coupe du monde 2018, est néanmoins palpable suivant les résultats. Le co-fondateur de MPP précise « qu’en plus des Français, les Belges et les Suisses n’hésitent pas à râler par le biais de notre newsletter ». De quoi stimuler encore plus le débat, au-delà du mur de la taille où les participants d’une même ligue peuvent discuter, râler ou encore se chambrer.
Pas de quoi pour autant étendre MPP aux compétitions domestiques européennes pour Martin Jaglin. « C’est un jeu qu’on utilise une fois tous les deux ans. Il ne fonctionne bien que sur des compétitions très resserrée, car il y a effervescence autour des matchs. Ce n’est donc pas prévu pour les championnats domestiques car pas grand monde ne se motiverait au-delà du début de saison. » Ce dernier songe notamment à d’autres systèmes de pronostics à l’année, lancés notamment voilà quelques saisons par Canal + ou encore la Française des Jeux, qui ne nécessitaient pas non plus de placer de l’argent, seulement de se penser en Nostradamus. Néanmoins, tous ont fini par être clôturés. Les fondateurs de MPG avaient néanmoins planché sur un autre format de pronostic, basé sur des transferts estivaux, comme le précise Martin Jaglin.
« On avait testé une autre app’ nommée Mon Petit Transfert à l’été 2018. L’objectif était alors de pronostiquer les transferts en fonction de possibilités incluant cinq challenges par semaine. Par exemple, on avait proposé un prono de transfert “Mbappé va-t-il rester à Paris ?” et plusieurs options telles que “Mbappé reste à Paris”, “il signe à Manchester City”, “il signe au Real Madrid”, “dans un autre club”… Mais ça n’avait alors pas bien pris », détaille l’entrepreneur.
Quelles perspectives d’évolution désormais ? « Pourquoi pas, à l’avenir, valoriser encore plus les pronostics précis. Nous proposons déjà de récompenser les scores exacts en doublant le nombre de points gagnés, mais affiner encore plus ce système, par exemple pour celui qui aurait mis 4-1 pour la France alors que score final fut de 3-1. Il mériterait mieux que le même nombre de points finaux que celui qui a pronostiqué un score de 1-0 ». Martin Jaglin imagine également, pour les puristes, l’opportunité d’ouvrir une fonctionnalité à la fin de chaque match se dirigeant vers les tirs au but. « On pourrait alors pronostiquer le nombre de t.a.b. marqués, les scoreurs potentiels… mais on veut quand même conserver avant tout un jeu facile et accessible à tous les profils ».
S’amuser sans risquer sa monnaie
L’un des points sur lesquels Mon Petit Prono se base pour attirer nombre d’utilisateurs potentiels est la possibilité de pronostiquer des résultats de match sans avoir à placer de l’argent. Selon Martin Jaglin, cela permet de faire participer de nombreux profils de personnes qui ne veulent pas, ou ne peuvent pas, jouer à des jeux d’argent. « Beaucoup de gens font des paris sportifs. Cela ne les empêche d’ailleurs pas de poursuivre ! Mais on voulait avant tout voir un ami qui tape du point sur la table, une ambiance légère et bon enfant, que le stress lié à la mise d’argent sur des pronostics de matchs ». Le cofondateur de MPP précise également recevoir nombre de messages de remerciements, notamment « de parents pouvant faire jouer leurs enfants dans une même ligue, mais aussi pour les personnes dont la confession ne leur permet pas de jouer à des jeux d’argent. Ils peuvent ainsi s’adonner aux pronos sans avoir à miser quoi que ce soit. »
L’avenir de MPP est pérenne, Jaglin précisant qu’on « pourrait faire une version payante, par exemple pour les entreprises qui voudraient favoriser la cohésion de leurs employés en les faisant participer à une ligue commune, mais comme c’est une fois tous les deux ans, on se concentre sur MPG, il ne s’agit pas de perdre de vue que c’est notre application phare ». Certaines firmes ont d’ailleurs choisi d’utiliser Mon Petit Prono pour séduire toujours plus de consommateurs. Il ne s’agit pas de partenariats avec MPP mais de choix indépendants de ces entreprises, comme Martin Jaglin le précise : « Des marques comme KFC ou Swile, ont même fait une ligue pour leurs consommateurs. Avec des récompenses pour le premier, le dernier, celui qui a fait le plus grand bond au classement… Par exemple, KFC offre au grand gagnant un an de match de l’équipe de France au stade, tandis que Swile finance un voyage au vainqueur dans le pays qui organisera le prochain Euro. C’est énorme ! »
La célèbre chèvre bleue peut donc envisager sereinement les prochaines saisons, elle qui compte toujours plus d’utilisateurs sur ses différentes applications. « Comme Mon Petit Gazon est devenu davantage célèbre grâce à son acronyme MPG, nous avons cherché une mascotte dans cette continuité. On pensait initialement à un animal, mais le lion ou l’ours ne nous convenaient pas, on ne voulait pas de quelque chose de prétentieux. » L’idée de la chèvre a alors fait son chemin. « Comme nos utilisateurs peuvent aussi bien être des amateurs assidus que des footballeurs du dimanche, la chèvre semblait idoine. On jouait sur le double sens, entre la goat, version anglaise du caprin, dont on traite un collègue pour le chambrer, et le G.O.A.T., acronyme pour désigner the Greatest Of All Time. En plus, l’imaginaire autour colle à notre image, légère et sympa. »
De quoi attirer jusqu’à des célébrités, qui ont contribué à faire passer MPG d’un projet personnel à une application utilisée à grande échelle. « C’est en 2017 que MPG a vraiment changé d’échelle. On avait alors lancé une ligue afin de lever des fonds, avec un gros lot qui permettait, en échange de 1000 euros, de faire un vrai match contre les fondateurs de MPG. Un utilisateur, d’abord anonyme, avait payé ce lot. Et finalement, il s’agissait de Martin Solveig. Il nous avait alors confié être totalement accro à notre concept ! »
Pas de quoi faire des folies financières cependant, alors que seize employés travaillent à plein temps pour faire fonctionner les applications. « On ne pourrait pas s’associer à des personnalités majeures pour faire notre promotion, à l’image de José Mourinho avec Top Eleven », explique Jaglin. « On veut avant tout conserver notre modèle fondé sur le bouche à oreille ». Les cofondateurs de MPP se préparent surtotu à vivre une fin de compétition animée avec leurs proches et leurs amis, puisqu’ils sont eux-mêmes des pronostiqueurs. « Entre nous, tu es toujours perdant dans notre cas. Quand tu gagnes contre tes amis ou ta famille, on t’accuse de tricher vu que tu as créé l’app. Sinon, t’es vu comme nul quand tu perds car on te dit que tu bosses là-bas et que t’es quand même incapable de gagner ». De beaux chambrages encore à venir pour un jeu qui a permis d’ouvrir le pari sportif à tous, qu’ils soient petits ou grands, amateurs comme professionnels, fins parieurs ou vraies chèvres.
Thibaut Keutchayan (visuel de Théo Mazars)