Ce vendredi 14 août, le monde footballistique a tremblé. Le grand FC Barcelone a subi une gifle monumentale de la part du Bayern Munich (2-8) en quart de finale de la Ligue des Champions. Dernière claque en date d’une lente descente aux enfers.
Le coup de sifflet final de l’arbitre slovène Damir Skomina ressemblait à une libération pour les Catalans. Enfin fini ! Après huit buts encaissés et une déroute historique, les joueurs de Quique Setién pouvaient retourner aux vestiaires la tête basse. C’est donc ça le Barça ? Du moins, c’est devenu “ça”. On ne le reconnaît plus, on ne souhaite même plus s’extasier. Le FC Barcelone qui nous a tant fait rêver a terminé un cycle et doit en commencer un nouveau. Le seul problème reste qu’il faut encore le dire à Josep Bartomeu. Arrivé à la présidence du club en 2014, ce dernier s’est distingué par ses transferts incompréhensibles et de grandes désillusions sur la scène européenne. Inutile de dire que les quatre Ligas remportées sous son mandat semblent dérisoires.
L’humiliation du Bayern ne ressemble en rien à un accident, ce que Bartomeu voulait nous faire croire sur les précédentes saisons. Un milieu inexistant tenu en laisse par un enfant de la Masia, vendu à 22 ans au Bayern, et un coup de grâce apporté par le joueur le plus cher de l’histoire du FC Barcelone, prêté à son adversaire d’un soir. On en rigolerait presque si ces deux anecdotes ne rejoignaient pas une série de mauvaises décisions qui laissent perplexes. Prenez Nelson Semedo, arrivé en provenance du Benfica Lisbonne en 2017. Il a complété vendredi soir trois saisons décevantes par une prestation absolument horrifique dans le stade qui l’a révélé. Sur le premier but ? 25 mètres derrière Perisic au moment où ce dernier centre pour Müller. Sur le second ? Sa relance sur Sergi Roberto ouvre la voie au pressing bavarois. Il perd ensuite le ballon sur le doublé de Müller. En seconde période, il se fait enrhumer par Davies, laisse Coutinho centrer pour Lewandowski, se retrouve totalement en retard sur le premier but de ce même Coutinho avant de rater son intervention sur la remise de Lucas Hernandez pour la huitième réalisation du Bayern. Il est donc impliqué sur sept des huit buts encaissés par son équipe. 30 millions sans les bonus. Et dire que Dani Alves évoluait auparavant à ce poste de latéral droit du FC Barcelone…
Et la Masia alors ? Au coup d’envoi de ce quart de finale, elle était représentée par Lionel Messi, 33 ans, Sergio Busquets, 32 ans, Gérard Piqué, 33 ans, et Sergi Roberto, 28 ans, sachant que ce dernier n’a même pas dépassé la mi-temps. Encore une fois le signe d’une incapacité à se renouveler. Le club n’a absolument pas anticipé les départs d’Andres Iniesta et de Xavi au milieu, s’en remet à des cadres fatigués pour porter à bout de bras une équipe sans aucune création, change d’entraîneur en pensant trouver l’homme providentiel à chaque fois qu’une nouvelle tête s’installe sur le banc… On n’a même pas envie de dresser la liste des transferts manqués par le Barça ces dernières années, il y en a tellement. On n’a même pas envie de distribuer les bons et les mauvais points tant le naufrage semble collectif et structurel. Josep Bartomeu tient bon à la barre, sans doute pour quelques mois encore, les élections ayant été avancées à mars 2021, au lieu de juin 2021. Les changements se trouveront à tous les niveaux, sans doute un peu tard.
Sur la scène nationale, le seul talent de Messi a suffi. Encore cette saison, ses 25 buts et 21 passes décisives ont porté l’équipe, sans que celle-ci ne parvienne à remporter le championnat cependant. Mais à force de s’en remettre au génie de l’Argentin, le Barça en a oublié sa philosophie de jeu. Cette équipe qui marchait sur l’Europe ne fait peur à personne désormais. Elle ne se repose que sur les cendres d’un héritage bafoué. Sur la scène européenne, les hontes successives auraient dû amener des réactions plus rapides mais la remontada contre le Paris Saint-Germain en 2017 a permis à Bartomeu de gagner trois ans, trois saisons de déceptions immenses. On en oublierait presque que le Barça, dès février 2017, avait subi un revers historique au Parc des Princes (4-0). Avec le recul, il y a dans cette leçon parisienne les prémices de la future descente aux enfers catalane, l’odeur du néant qu’allait devenir cette équipe. Quelques semaines après ce match épique, la Juve ramène sur terre le FC Barcelone (3-0) sans que personne ne bronche. Alors, on se dit que la gifle de Rome en 2018 va amener de grands changements dans ce club qui file sur la mauvaise pente. Bien sûr que non, être éliminé au Stadio Olimpico après avoir remporté la manche aller (4-1) ne semble pas inquiéter plus que ça. Ernesto Valverde se retrouve même conforté à la tête de l’équipe. Puis, Anfield. Aveuglés par la prestation démentielle de Messi à l’aller, les Barcelonais ont oublié de se penser en collectif au retour. Le résultat reste historique, quatre buts concédés et toujours pas de chamboulements. Valverde ? Se queda…jusqu’à janvier 2020, deux ans et demi de perdus.
La Juve allait tout de même terminer vice-championne d’Europe 2017, la Roma jouait son match du siècle, la remontada d’Anfield réduite à un coup du sort, un corner rapidement effectué par Alexander-Arnold. Autant d’excuses qui ne passent pas et qui ne peuvent expliquer la performance médiocre de vendredi soir. Le massacre paraît s’achever, grâce à une leçon munichoise. Le Bayern, cette équipe dominatrice sur le terrain, ce club parfaitement géré depuis longtemps, ayant préparé les départs de ses légendes, Robben et Ribéry, avec soin, pensant à l’avenir et à leurs remplaçants. Le Bayern, ce monstre qui a enterré les dernières lueurs du FC Barcelone que nous avions connu, une bête qui agonise désormais. La fin d’une époque.
Nicolas Mudry