Longtemps considéré comme le successeur de Xavi, d’Iniesta ou encore de Messi dans le milieu de terrain barcelonais, Ricard Puig i Marti, plus connu sous le nom de Riqui Puig, était surnommé « La perle de la Masia ». Quatre ans après sa première apparition sous les couleurs blaugranas, le crack de Matadepera s’envole pour la cité des anges à seulement 23 ans. Alors nouveau départ ou retraite anticipée ?
Le départ de Riqui Puig semblait acté, après une nouvelle saison à cirer les bancs ou les gradins du Camp Nou, il n’était pas dans les plans de Xavi. Pas plus qu’il ne l’était dans ceux de Valverde, Sétien ou Koeman auparavant. Après avoir disputé seulement 18 matchs, le Catalan devait se trouver un nouveau challenge où il pourrait espérer un temps de jeu plus conséquent, voire une place de titulaire. Si les Culers entendent parfaitement ses motivations, le choix de la destination étonne bien plus. La Major League Soccer est encore considérée comme l’antichambre de l’EPHAD footballistique. Pourtant les joueurs qui décident de traverser l’Atlantique pour le Nouveau Monde sont de plus en plus jeunes, symbole de la progression de la MLS.
Le petit prince de la Masia
Riqui Puig avait tout pour réussir au Barça : un talent hors-norme, une technicité supérieure à la moyenne, une belle gueule et une éclosion providentielle. En effet, le petit prince barcelonais entre en jeu pour sa première en pro le 5 décembre 2018 en Coupe du Roi ; mais c’est véritablement lors de la cataclysmique saison 2019-2020 qu’il intégrera pleinement l’équipe première, sous les ordres de Quique Sétien. Saison qui sera le début de l’instabilité côté Barça : trois entraîneurs successifs en à peine un an (Valverde, Sétien et Koeman), la pire humiliation subie par les Blaugranas en Ligue des champions avec la correction imposée par le Bayern en quarts de finale (8-2) et enfin la pandémie de Covid qui bousculera grandement les certitudes et les championnats sportifs. L’été 2020 sera également celui du Burofaxgate entre Lionel Messi et l’ancien président de l’institution Josep Maria Bartomeu, suite à la cession de Luis Suarez à l’Atletico Madrid. Au cœur de ce marasme, l’éclosion d’un joueur fait renaître l’espoir chez les supporters : Riqui Puig.
Riqui Puig c’est surtout un symbole, celui d’un retour de la grandeur de la formation barcelonaise. Après la génération dorée des années 2000 (Xavi, Iniesta, Messi, Piqué), la formation catalane a connu un creux générationnel et une politique de recrutement de l’ex-présidence en défaveur des jeunes de la formation.
A nos actes manqués : l’illusion Riqui Puig
Attendu comme le jeune providentiel, symbole du renouveau et donc du futur du FC Barcelone, Riqui Puig ne parviendra jamais à avoir de la continuité. Concurrence rude et système inadapté à son style de jeu en seront les causes principales. Malgré son amour indéniable pour le club et sa volonté de faire une carrière au Barça, son futur s’écrit désormais bien loin de la Catalogne.
Milieu relayeur de talent, Riqui Puig a surtout brillé en étant placé comme milieu axial dans un système en 4-3-3. L’arrivée de Ronald Koeman en août 2020 ne plaide pas en faveur du joueur. Souhaitant faire évoluer son équipe en 4-2-3-1 avec Frenkie De Jong et la nouvelle recrue Pjanic, Riqui Puig ne rentrait pas dans son système. Koeman lui a d’ailleurs tout de suite fait comprendre en ne le convoquant pas pour l’édition 2020 du trophée de Joan Gamper. Il ne fera que de brèves apparitions durant le règne du Néerlandais, poussant les supporters à dénoncer cette placardisaton avec le #Riquinosetoca (on ne touche pas à Riqui). L’arrivée de Xavi en Novembre 2021 aurait pu être le signe d’un renouveau pour le temps de jeu de Riqui puisque l’ex-numéro 6 barcelonais souhaitait instaurer un 4-3-3, configuration dans laquelle Puig a toute sa place. Mais pour le technicien catalan, qui l’a toujours défendu dans les médias, c’est un tout autre son de cloche lorsqu’il arrive aux manettes.
L’éclosion de la nouvelle génération dorée made in Masia change la donne. Avec Gavi et Nico en plus de Pedri et Frenkie De Jong : beaucoup d’appelés mais très peu d’élus dans ce milieu barcelonais. Riqui Puig n’est qu’un second couteau même si ses performances à l’entraînement sont saluées par Xavi himself. Joueur clivant, son attitude jugée arrogante et son hygiène de vie ont souvent été décrié par ses détracteurs.
Le jeune catalan ne parviendra jamais à s’imposer dans l’équipe comme prétendant à un rôle de titulaire ; il devra se contenter de bouts de matchs et de quelques (trop) rares titularisations. Le mercato côté Barça ne laissait que très peu d’espoir sur le futur du joueur au sein du club avec les arrivées de Pablo Torre et Franck Kessié, le non-départ de De Jong ainsi que la confiance accordée à Pedri et Gavi. Puig se devait de trouver un nouveau challenge avec du temps de jeu et de la continuité à la clé.
Le 4 août 2022, l’annonce du Barça confirme les bruits de couloir : un deal a été trouvé avec le club de Los Angeles Galaxy pour le transfert de Riqui Puig.
Une incompréhension pour beaucoup : comment un jeune plein de promesses peut-il faire le choix d’un championnat de second rang pour poursuivre sa carrière ? Surtout lorsque le joueur avait des offres de clubs européens.
La MLS, un championnat de second rang ?
Dans les esprits européens, la MLS, c’est pour les fins de carrière, au même titre que les championnats chinois, émirati ou qatari. Une destination où douceur de vivre, durée du championnat et argent généré ne riment pas forcément avec exigences du football de haut niveau. Clichés.
Premier grief contre les Américains : nommer la quintessence qu’est le Football « soccer », en opposition au football américain. Comme si un sport se jouant avec un ballon ovale, à la main avec des équipements dignes du hockey et des poteaux pouvait se prévaloir du terme « Football ». Une fracture originelle qui ne pourra jamais réellement se résorber.
Pourtant, le championnat américain n’est pas forcément une voie de garage pour des footballeurs en fin de carrière. Le championnat progresse et attire des joueurs de plus en plus jeunes, comme en témoigne les transferts de l’été : Insigne (31 ans) et Bernardeschi (28 ans) vers le Toronto FC et donc désormais Riqui Puig (22 ans). La MLS ne se contente donc plus d’attirer uniquement des joueurs en provenance des championnats d’Amérique du Sud ou des joueurs à la gloire passée venant relever un dernier défi avant la retraite sportive.
En outre, le championnat américain est de plus en plus suivi en Europe, notamment sur les réseaux sociaux avec certains scouts ou twittos qui mettent en valeur les pépites en permettant au grand public de les découvrir en avant-première. Certains de ces cracks made in MLS viennent ensuite s’essayer en Europe avec plus ou moins de succès. La MLS a également pu s’offrir une visibilité grâce aux stars et entraîneurs qui ont pu s’y essayer : David Villa, Patrick Vieira, Thierry Henry, Ibrahimovic et encore bien avant Pelé.
Critiquer la MLS en la comparant à un championnat de retraités, montre bien la vision ethnocentrée de certains amateurs de football. Même si l’Europe, aujourd’hui, semble être le centre de gravité du football mondial, cette hégémonie dans un futur proche risque d’être grandement bouleversée. Les championnats des autres continents se structurent et deviennent de plus en plus attrayants, et la MLS fait partie de cette catégorie. Il est d’ailleurs fort probable que dans les prochaines années, certains joueurs privilégient le système de formation américain plutôt que le modèle européen, vivement critiqué pour les dégâts engendrés notamment sur la santé mentale des joueurs.
La MLS a des arguments à revendre : un championnat compétitif, un modèle de formation qui met au même plan carrière sportive et universitaire ainsi qu’un attrait financier qui ne cesse de croître. Reste à savoir si l’arrivée de Riqui Puig, en cas de succès outre-Atlantique, donnera des idées à d’autres jeunes joueurs…