La Bundesliga a déjà regagné les écrans, la Premier League, la Liga et la Serie A suivent le mouvement presque à l’unisson. La Gaule ? Ah oui c’est vrai, il y a la Ligue 1 dans le foot européen… Depuis quelques jours, l’ensemble des médias français spécialisés se pose la question : la France passe-t-elle pour une idiote en étant la seule à ne pas reprendre le football ?
Si une majorité des arguments sont plutôt en faveur d’une reprise “logique” de la Ligue 1, la manière dont est traitée la question soulève un déni latent dans le milieu de la presse foot française : le football, en France, n’est peut-être pas si important. Dans un édito publié le 29 mai dernier sur le site de L’Équipe, Vincent Duluc écrit : « Nous serons le seul pays majeur du football européen à nous tenir à cette décision ». Ce qui m’interpelle, c’est qu’il qualifie le football français de « majeur » en Europe.
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C’est là une question qu’on a du mal à se poser comme si nous voulions ne pas voir en face une réalité que nous connaissons déjà au fond de nous : le football français n’a pas l’air si majeur que ça. Certes, nous avons la meilleure équipe nationale du monde, mais quand est-il de nos clubs ? Ils sont vaillants c’est sûr, mais ont-ils le même rayonnement que leurs « équivalents » Anglais ou Italiens ? Elle est dure cette vérité en fin de compte. Notre football n’est ni majeur au niveau européen, ni pour nous, Français. Il n’est pas majeur au niveau européen tout d’abord parce que nous n’avons pas d’équipe réellement compétitive. Seul un club a gagné la coupe aux grandes oreilles, je n’étais même pas né, et le rayonnement du club phocéen repose énormément sur ce fait d’armes et aussi parce que les supporters emploient toutes leurs forces, tous les jours, à le rappeler au monde entier. Et ont-ils raison? Certainement. Ils participent au rayonnement de leur club. Mais cela reste très faible face à des clubs arborant un palmarès européen bien réel et encore d’actualité. Et l’Olympique de Marseille fait aussi office de clubs à part ces dernières années avec son rival olympien et le PSG quant à l’intérêt que les spectateurs y portent. De manière générale, tous les ans, on déplore une désertion des stades… Donc critiquer l’absence d’une reprise en tant que journaliste parce que dans le fond, on ne sait plus quoi dire pour parler du football français et en même temps en vouloir à Aulas de se donner en spectacle lui reprochant de ne le faire que pour sa pomme, c’est de la provoc’ ?
Le Paris-Saint-Germain ? Je crains que le club n’ait pas une aura encore assez imposante pour être considéré comme un acteur majeur du football européen, sur le plan sportif j’entends. Économiquement, le club de la capitale est très notoire, mais arrêtons de nous voler la face, cela va maintenant faire 10 ans que le club bénéficie de moyens colossaux, cirant sur tous les toits que leur objectif c’est la Champion’s League, et leur seul palmarès européen reste de ne pas avoir perdu contre Barcelone en 2013 et l’entrée du mot « Remontada » dans le vocabulaire footballistique européen. Leurs seuls coups d’éclat auront été de verser des sommes astronomiques dans des transferts relevant parfois davantage de coups de com’ plutôt que d’un réel renforcement sportif. A titre comparatif, la Juventus, qui possède la même hégémonie en Italie et un budget globalement équivalent voire moindre sur la même période, possède deux titres mais surtout a disputé deux finales de Ligue des Champions. Ils ont construit un stade aussi, accessoirement.
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La réalité semble s’imposer : la France n’est pas un pays majeur du football européen. Nous sommes plutôt de second rang, comme peuvent l’être le Portugal, les Pays-bas ou m^ême la Russie ; de temps à autres, un de nos clubs fait un très beau parcours européen, à l’instar de Monaco ou de l’Ajax plus récemment, et ces parcours sont si rares qu’on en parle comme un exploit, un destin inattendu etc… La preuve, la maigre victoire 1-0 à domicile de Lyon sur la Vielle Dame a été qualifiée “d’exploit” ou “tour de force”. On avoue nous-même, match après match, qu’on n’est pas taillé pour, qu’on est jamais favoris.
Ainsi, seul l’argument de l’économie soutiendrait la nécessité d’une reprise de football français. Et encore, l’immédiateté ne doit concerner que les clubs les moins bien lotis du championnat. Ceux dont la précarité des emplois les plus invisibles et pourtant indispensables est plus que jamais d’actualité. Pour le reste, c’est surtout l’année prochaine qui est regardée à l’horizon. Reprendre le championnat et espérer décrocher un ticket pour les compétitions européennes est avant tout, pour certains clubs comme l’Olympique Lyonnais par exemple, un objectif économique plutôt que sportif.
En fin de compte, sera-t-il difficile d’avoir raison tout seul ? La question ne me semble pas pertinente, nous ne sommes pas seul. Enfin si, nous sommes les seuls à croire que l’on fait partie du football majeur européen.
Paul Laurens